Témoignages 2

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Témoignages

Edith Favre

Une famille Juive à Vivonne

A cette époque, la gendarmerie recevait des lettres officielles dans le courant de la journée revêtue de la mention « à n’ouvrir que le lendemain matin ».  Le Brigadier-chef Largeau, à l’insu des autres gendarmes, prit connaissance de la lettre qui demandait l’arrestation de cette famille et informa discrètement la pharmacie Courreges. Elles échappèrent ainsi à la mort et elles revinrent à Vivonne après la guerre pour ensuite regagner la région parisienne.

Cependant, le Brigadier-chef Largeau fut arrêté par la Gestapo et la milice, fut interné à la prison de la Pierre Levée où il sera torturé puis condamné à mort. Menacé d’exécution à la butte de Biard, il essaya de se suicider en se piquant le cœur avec une forte aiguille. Transporté à l’hôpital, il échappa à l’exécution et à la fin de la guerre, il reprit son service.

Famille Meyer et gendarme

(d’après une correspondance et un suivi de Roger Chabanne)

Arrivée durant la débâcle de 1940, la famille Meyer comprenait la mère, la grand-mère et un garçon âgé de 8 à 10 ans, Claude. Elle habitait au 54 grand-rue. Chaque jour nous les voyions passer faire leurs courses. L’enfant, vêtu d’un par-dessus et portant une casquette, allait à l’école laïque située à l’époque dans les locaux proches de la mairie. Nous les avons vus un jour portant l’étoile jaune obligatoire avec la mention « juif ». A chaque fois cela me faisait de la peine de voir ces êtres, ainsi désignés. A cette époque, bien que nous sachions qu’ils étaient considérés comme indésirables par les Allemands, nous ne savions pas qu’ils pouvaient être conduits dans des camps de la mort.

Famille Meyer (témoignage Roger Chabanne)

Le 15 août 2003 il m’est possible de terminer l’histoire de la famille Meyer et d’apporter tous les éléments sur leur venue à Vivonne et sur leur départ précipité ainsi que sur leur vie d’après.

Cette famille vivait à Vivonne avant la déclaration de guerre. Elle avait des attaches familiales à Poitiers, des commerçants bien connus à cette époque. Comme la grand-mère était fatiguée et qu’elle avait besoin de repos, sa famille poitevine lui trouva un logement chez Madame Juteau, au 52 grand-rue. Ils y sont restés jusqu’au moment de l’arrestation de tous les juifs Français.

Le 15 août 2002 Monsieur Jean-Claude Juteau recevait un appel téléphonique d’une personne qui devait venir quelques jours à Vivonne  pour revoir le logement où elle avait vécu pendant plusieurs années. Cette personne s’appelait Claude Meyer, l’enfant juif qui m’avait marqué jusqu’à ce jour. Monsieur Juteau m’en ayant fait part, me demanda si j’avais des souvenirs de cette famille. Je lui communiquais mon témoignage sur la Seconde guerre mondiale à Vivonne, dans lequel je relate les détails de son départ. Enfin selon ce que j’en savais à l’époque.

 

En 2003, au mois d’août, Madame et Monsieur Meyer sont revenus à Vivonne. Cela a été l’occasion de retrouvailles chez Monsieur Jean-Claude Jutteau.

 Au cours de cette réunion nous avons échangé sur tous les événements de cette époque et, en particulier de leur départ de Vivonne. A ce propos je parlais des renseignements donnés par l’ancien chef de brigade de gendarmerie qui avait, clandestinement, essayé de faire passer un message pour qu’ils puissent fuir avant l’arrestation, programmée le lendemain à 6 heures du matin. En réalité, la famille Meyer n’a pas eu connaissance de ce message, car alertés plus tôt, ils étaient déjà partis chez une voisine. Ils avaient été avertis par leur famille de Poitiers qui avait eu l’information d’un ami travaillant à la préfecture. Ils avaient envoyé, en vélo, une de leurs employées qui connaissait Vivonne, en compagnie de sa fille Madame Chaumet. Il y avait urgence car  le courrier était distribué à Vivonne en fin d’après midi ; le chef de brigade ne pouvait  faire parvenir le message plus tôt. Au début de la soirée la famille Meyer fut prise en charge par le docteur Dufour qui, avec sa voiture, leur a fait passer, sans encombre la ligne de démarcation et les a déposés, vers Montmorillon, au petit village de Villemort où ils ont vécu jusqu’en 1945 , dans l’arrière boutique d’une épicerie.

Famille Meyer 

Monsieur Meyer est âgé de 75 ans. Il devait être officier dans l’armée française à un poste important qui lui a permis de connaître l’ingénieur anglais chargé d’enquêter en Irak sur les armes de destruction massive. Nous avons aussi discuté sur de « cancans » qui ont circulé au moment de la retraite allemande.

P.S: le brigadier chef Largeau de Vivonne fut arrêté par la gestapo et la milice et fut interné à la prison de La Pierre Levée où il fut torturé, puis condamné à mort. Menacé d’exécution à la butte de Biard, il essaya de suicider en se piquant au coeur avec une forte aiguille. Transporté à l’hôpital il échappa à l’exécution. A la fin de la guerre il reprit du service. Il habite, maintenant, au Château d’Olonne et comme il est handicapé il a souhaité, avant sa mort avoir des nouvelles de cette famille, tâche qu’il a  son fils. Il lui avait donné, en particulier, un mot pour la famille Courrèges.